Plusieurs projets de réformes touchant à l’audiovisuel sont en réflexion depuis plusieurs mois. La nomination d’un nouveau ministre, Franck Riester, qui s’est malheureusement illustré dans le cas tristement célèbre d’Hadopi, pourrait finalement accélérer les choses.

Il y a l’arlésienne chronologie des médias qui est censée s’adapter aux nouveaux usages (Vidéo à la demande avec et sans abonnement bien plus que la TNT) et éviter le piratage de oeuvres. Ce changement en profondeur consisterait à réduire le temps entre la sortie en salle et la diffusion sur d’autres canaux.

Clay et Hanna

D’un autre côté, l’Union Européenne demandera aussi aux plateformes de vidéo à la demande par abonnement comme Netflix et Amazon Prime Video (mais aussi Youtube) au moins 30 % de films, séries et documentaires européens. Les états membres auront aussi la possibilité d’imposer une contribution financières à ces acteurs.

Dans les faits, cela a-t-il du sens et que va réellement changer dans le quotidien des amateurs des petits et grands écrans, mais aussi des artistes et producteurs ?

Une réforme pour accélérer la chronologie des médias, de la poudre aux yeux dans les faits ?

On ne finit plus d’en parler de la chronologie des médias. Pour rappel, cette chronologie résume le temps entre la sortie en salle ou sur un support quelconque d’un produit audiovisuel et sa disponibilité de manière gratuite et illimitée. Entre la sortie dans les cinémas et la diffusion sur une chaîne publique gratuite peut s’écouler entre 8 et… 36 mois voire plus ! Le Ministère de la Culture souhaitait, initialement, bouleverser cette chronologie pour la réduire significativement.

Malheureusement, bien qu’elle semble bénéficier aux usagers mais également aux auteurs et producteurs d’oeuvres qui n’ont pas eu le succès escompté en salles (et ils sont nombreux, tous le monde ne s’appelle pas Marvel) cette négociation patine entre les différentes parties prenantes. À se demander si des acteurs historiques, comme Canal +, n’ont pas tout intérêt à la faire échouer ou accoucher d’une souris, afin de rester un acteur ultra-dominant pour les cinéphiles. On se met à leur place : ils sont malmenés dans le football, l’hémorragie d’abonnés n’en finit plus suite à une incapacité à s’adapter (tarifs élevés, engagements aberrants, peu de flexibilité dans les offres), CanalPlay a fermé, les Guignols et les émissions emblématiques en clair c’est terminé … Bref le Canal + de Vincent Bolloré n’est définitivement plus celui que l’on a aimé… et il tente encore de résister au changement.

Le jour où j’ai souhaité voir "The Witches of Oz" sur CANALPLAY INFINITY. Test du service de vidéo à la demande par abonnement du groupe Canal+. 14

Plusieurs professionnels du secteur tirent la sonnette d’alarme sur ce qu’ils appellent de la « poudre aux yeux ». Les projets de nouveau calendrier de diffusion ne changent, in fine, pas grand-chose. Si cela perdure ainsi le gouvernement pourrait légiférer dans un sens ou d’autre l’autre … C’est ce que laisse entendre le nouveau ministre.

Netflix et Amazon devront promouvoir l’audiovisuel européen… ce qu’ils font déjà en grande partie

La nouvelle réglementation, entérinée à la rentrée, oblige les plateformes de vidéo à la demande à revoir leurs catalogues afin de proposer un plus large choix de produits européens. Ces plateformes pourront également, à la demande des états, soutenir l’audiovisuel des pays où elle cible des utilisateurs, en finançant des projets, et ce, de manière proportionnelle à leurs recettes. L’Union Européenne promet déjà de publier des statistiques afin de s’assurer que les objectifs seront atteints.

Cela peut sembler louable de ne pas se laisser submerger par des productions essentiellement américaines et, il faut l’avouer, diablement efficaces dans ces formats. Nous sommes nombreux à ne plus regarder la télévision comme avant (heureusement il y a Molotov) et aller moins au cinéma, séduits par les séries TV. Mais n’est-ce pas plutôt en proposant des oeuvres de qualité, des plateformes innovantes avec une dimension européenne, que l’on devrait s’y prendre ?

Après vérification, les catalogues de Netflix et d’Amazon font déjà la part belle à l’audiovisuel européen. Parce qu’ils savent trouver les talents, mais aussi parce qu’ils ont besoin d’étoffer rapidement leur catalogue avant que ne leur échappe les droits Disney, Fox et Warner Bros pour ne citer qu’eux. L’effort à faire sera moindre pour atteindre le quota de 30 %, sachant que Netflix a d’ores et déjà trouvé la « parade » au bouleversement de son catalogue. Cette société de production participe déjà à hauteur d’un milliard de dollars dans des productions européennes, essentiellement créées en Espagne par… Netflix elle-même !

Les plateformes de VOD se chargent déjà de promouvoir ainsi une nouvelle forme de cinéma et de séries d’origine française, italienne et de bien d’autres nationalités de l’Europe. Ils ont d’ailleurs encore un peu de temps, car les états membres doivent encore transposer les textes, et on sait à quel point le process sait être long et complexe.

Qu’en diront Disney/Fox et la Warner Bros qui s’apprêtent à lancer leur service de Vidéo à la Demande par abonnement pour contrer Netflix ?

De « nouveaux acteurs » pourraient bientôt se mêler de ces discussions pour trouver une possibilité de croissance importante.  Il s’agit de Disney et la Fox d’un côté, et la Warner Bros de l’autre qui préparent leur version de Netflix. Certes cela prendra du temps avant qu’ils n’arrivent, ils ciblent d’abord les États-Unis, et pour tous les autres pays il va falloir attendre que les droits concédés à gauche et à droite expirent ou soient rachetés. Mais on peut très bien imaginer que Disney ait envie d’exploiter rapidement ses titres phares sur sa plateformes de VOD dès qu’ils ne sont plus projetés en salle. On se dit également que cette nouvelle stratégie va, une nouvelle fois, bouleverser le paysage audiovisuel qui repose aujourd’hui sur des règles d’un ancien temps.

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La montagne accouchera d’une souris … mais laquelle ?

Avec ces deux « bouleversements du numérique » pas sûr que l’amoureux du 7e art et de la télévision y trouve son compte… Et dans tout ça personne ne parle de la juste rémunération et protection des créateurs du web …