Suite de l’article « Disney et la France, les 20 ans d’Euro Disneyland » de Sébastien Roffat (partie 1 : De l’idée à l’ouverture). L’ouvrage couvre ensuite les 15 premières années du parc Disneyland Paris (1992 à 2007). Il n’aborde donc pas la présidence actuelle de M. Philippe GAS, qui donnera lieu à une note dédiée très prochainement sur ce blog. Enfin, pour en savoir plus sur les projets actuels dont Villages Nature, et celui du troisième parc c’est ici : « Mesdames et Messieurs, et vous les enfants », découvrez bientôt Villages Nature (et d’autres nouveaux projets Euro Disney) et ici sur la page Scoop It de Disneyland Paris que je tiens à jour quotidiennement. 

Le lancement d’EuroDisney s’est donc effectué en grandes pompes le 12 Avril 1992 (vidéo ici). Ce projet pharaonique signé Disney connaît malheureusement et contrairement à toutes les prévisions des débuts difficiles. Les objectifs de visites sont difficilement atteintes, le taux d’occupation des hôtels est bien en dessous des attentes, et la consommation sur place plus faibles que dans les parcs américains et japonais. Les premiers à manquer à l’appel sont alors les Français eux-même. 

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Parmi les erreurs de jeunesse, il y a très probablement un tarif trop élevé, et qui ne tient pas compte de la saisonnalité. Le calque des autres parcs a par ailleurs masqué des différences culturelles. L’européen dispose de plus de jours de vacances, ses dépenses sont donc réparties dans l’années alors que l’américain ira concentrer ses dépenses sur moins de temps. La consommation de nourriture est également répartie dans une journée aux USA alors que les européens ont d’autres habitudes dont il faut tenir compte. 

Mais il y a aussi une conjoncture qui est alors difficile. Le marché de l’immobilier est déprimé, les taux d’intérêts sont hauts et l’inflation basse. Cela rend un fort endettement très lourd. Le projet de second parc est rapidement gelé. 

Plusieurs président vont venir à la rescousse de la société EuroDisney, créant un sentiment d’instabilité pour certains salariés. Chacun apportera pourtant sa pierre à l’édifice et marquera plusieurs périodes.

  • En 1993, Philippe Bourguignon. Il baisse de 30% les tarifs pour les franciliens. Il met en place des billets pour des soirées appelées Star Nights. De nouvelles attractions font leur apparition pour désengorger les files d’attente et renouveler l’intérêt du parc comme « La galerie du Château de la Belle au bois dormant », « Le pays des contes de fée », ainsi que « Indiana Jones et le temple du péril ». La Walt Disney Company (WDC) face aux difficultés mets les investisseurs au pied du mur en indiquant être prêt à se désengager complètement si une solution n’était pas trouvée, le parc Disneyland ne valant plus rien sans l’apport de la marque. En Mars 1994 un compromis est trouvé avec des efforts partagés et une nouvelle stratégie marketing. On annonce aussi le 1er Juin, l’arrivée dans le capital du neveu du roi Fahd d’Arabie Saoudite : le prince Al-Walid. Le 19 Mai 1994 ouvre la gare TGV qui va relier à terme le complexe au Royaume Unis via l’Eurostar (1996) ainsi qu’à la Belgique et aux Pays Bas via le Thalys. Suite à des propos de Gilbert Trigano (Club Med), Philippe Bourguignon décide de renommer EuroDisney en Disneyland Paris, en passant par des phases transitoires comme EuroDisneyland Paris avec un « Euro » plus ou moins grand.  Cela sera effectif le 1er Octobre 1994. L’ouverture d’une attraction phare très attendue « Space Mountain » s’effectue le 1er Juin 1995 accompagné d’efforts sur les prix. Il aura coûté la bagatelle de 650 millions de francs. Le nombre de visiteurs s’accroît et la société souffle un peu, d’autant que des festivités s’organisent régulièrement autour de récents succès comme La Petite Sirène (1989), La Belle et la Bête (1991), Aladdin (1992) et Le Roi Lion (1994), qui sont d’énormes succès, tout comme Toy Story (1995) de Pixar. En 1996 ouvre au Disney Village un restaurant Planète Hollywood. Le 5ème anniversaire du parc est fêtée sous le thème du « Carnaval des Fous » en synergie avec le film « Le Bossu de Notre Dame » inspiré de l’oeuvre de Victor Hugo. Le 17 Février 1997 est marqué par la démission de Philippe Bourguignon qui part pour le Club Med. 
  • En 1997, il est remplacé par Gilles Pelisson, le neveu du co-fondateur du groupe Accor qui en est furieux. En Mai 1997 ouvre au Disney Village le complexe cinématographique de Gaumont qui ne cessera de s’agrandir. La fréquentation du parc s’établit à 12,6 millions de visiteurs cette année, ce qui semblera être un premier pallier difficile à franchir. En 1998 le parc fête « Les Grands Classiques » en l’honneur des 70 ans de Mickey et des 75 ans de la Walt Disney Company. Le second centre de congrès ouvre la même année. Cette offre rencontre un vrai succès. 1999 marque l’arrivée des passeports franciliens, 60 000 seront souscrits. La société connaît également ses premiers mouvements sociaux, même s’ils sont jugés comme mineur au regard de la masse salariale. Le Management à l’américaine est pointé du doigt par les syndicats notamment dans la presse. Printemps 2000 autre nouveauté importante, l’arrivée du Fast Pass qui permettra de réduire les temps d’attente, vraie plaie des parcs d’attraction, de 45%. Mais le 4 Mai 2000 Gilles Pelisson quitte la société pour rejoindre le groupe SUEZ Lyonnaise des Eaux. 
  • En 2000 il sera remplacé par Jay Rasulo mettant une parenthèse à la présidence française de la société. Un pic de fréquentation est atteint en 2002 avec 17 millions de visiteurs dont 4,5 millions pour le Walt Disney Studio. Alors que l’année 2001 a été marqué par une déception avec l’ouverture du California Adventure aux USA, et une grande satisfaction pour le Disney Sea au Japon (qui bénéficie du budget conséquent attendu pour l’ouverture d’un parc de cette envergure), le 16 Mars 2002 ouvre le second parc Disney à Marne La Vallée. Le Walt Disney Studio est une grande déception. Moins peaufiné que son aîné à quelques mètres de là, il souffre surtout d’un manque cruel d’attractions (9 attractions à son ouverture sur une surface moitié moins grande), son tour étant fait en une demi journée. Par ailleurs il cannibalise le premier parc. En effet il faut prendre des billets supplémentaires pour y accéder. L’objectif ne cessera alors d’être, aujourd’hui encore, de produire une expérience d’une journée avec une plus grande superficie et plus d’attractions. Par ailleurs viendra la création du passeport 1 jour 2 parcs, qui accroîtra l’expérience des visiteurs. 

  • Promu en Septembre 2002, Jay Rasulo devient Président de la division Parks and Resorts de la Walt Disney Company. Il n’est remplacé que le 1er Juillet 2003 avec l’arrivée d’André Lacroix. La campagne « Envie de Magie » est lancée. La parade Fantillusion crée au Tokyo Disneyland arrive à Paris, amputée en partie. L’investissement sur le second parc, et l’échec (bien que celui ci soit tout relatif) de sa fréquentation rend la situation à nouveau très tendue pour EuroDisney qui annonce à la WDC ne pas pouvoir régler les royalties en 2003. Le 28 septembre 2004 aura lieu une nouvelle restructuration de la dette. L’action atteint un plus bas historique en dessous de l’euro symbolique. A la surprise générale André Lacroix quitte EuroDisney en Mai 2005 où il est remplacé par Karl Holz qui ne parle alors pas un mot de français. Le 29 décembre de la même année 300 à 400 salariés manifestent devant le parc. Après cette période difficile, le parc prépare et lance les festivités pour son quinzième anniversaire en 2007.Celui-ci marque l’arrivée du train des personnages et de la parade des rêves Disney que nous connaissons aujourd’hui. On commence aussi à évoquer officiellement le projet « Villages Natures« .

D’autres points, non directement liés aux deux parcs s’ajoutent à cet historique. Tout d’abord la création du pôle urbain de Val d’Europe. Celui-ci démarre en 1998. Le 24 Octobre 2000 un gigantesque centre commercial est inauguré. Le Centre Ville sera terminé en 2002. Et en 2003, comme d’autres grandes sociétés, Walt Disney Company déménage des bureaux parisiens sur 10 000m2. Outre des bureaux, des zones commerciales, des hôtels, des zones résidentielles sont également crées. C’est un volet du projet Disney qui est plus rarement cité que son parc emblématique. 

Parallèlement à ces évènements hexagonaux, la Walt Disney Company subit quelques turbulences. Michael Esner est de plus en plus contesté, notamment par Jeffrey Katzenberg qui quitte le groupe le 24 Août 1994 pour fonder Dreamworks, Roy Disney (fils, et neveu de Walt) mais également par Steve Jobs alors à la tête de Pixar qui produit les seuls grands succès de Disney en terme d’animation. La chaîne ABC acquise est en perdition. Comcast, le réseau câblé américain, déclenche même une OPA hostile. Finalement il démissionne le 30 Septembre 2005 pour être remplacé par Bob Iger. Le 23 Janvier 2006, Disney rachète Pixar par échanges d’actions, Steve Jobs devient alors le premier actionnaire individuel avec 6%. John Lasseter prend alors en charge tout le département animation Disney + Pixar ce qui conduira, selon moi, à un renouveau créatif chez Disney.

Les débuts de Disneyland Paris ont de toute évidence été chaotiques, un mauvais positionnement marketing au départ, ainsi qu’un apprentissage progressif des attentes des européens associé à une mauvaise conjoncture, ont fait que la société EuroDisney aurait pu déposer son bilan laissant ces magnifiques parcs, ainsi que sa masse salariale, complètement à l’abandon. Ce cauchemar a été évité, parce qu’il faut aussi voir le potentiel et comparer ce qui est comparable. Tout d’abord Disneyland est la première destination touristique européenne. Elle rapporte énormément au niveau fiscal à l’état, à la région et au département de Seine et Marne. Le développement de cette zone a été spectaculaire. Disneyland est aussi le point d’ancrage de Disney en Europe. Enfin tout est toujours relatif quand on sait qu’en un an le site accueille plus de touristes que la Grèce, la Tunisie et le Maroc réunis même si tous le monde aimerait qu’EuroDisney ai les mêmes ressources que Tokyo Disneyland.

Pour conclure je vous conseille, si vous aimez Disneyland Paris, et si vous êtes intéressé par les coulisses de la vie d’EuroDisney SCA de vous procurer ce livre. Une interview de l’auteur est également disponible ici. Il est certes parfois difficile car accumulant les chiffres, les noms et certaines explications juridiques ou financières parfois complexes, pour autant vous pourrez apprendre beaucoup de choses (sur la Walt Disney Company également). Un autre site pourra également satisfaire votre curiosité : http://www.eurosouvenirland.com/

Article à suivre avec la présentation de la dernière période non couverte par cet ouvrage : la présidence de M. Philippe GAS l’actuel Président d’EuroDisney SCA.