Habituellement, lors de mon arrivée chaque matin, la personne aidée se plaint d’avoir mal dormi.

Mais cette fois c’est différent. Elle refuse la prise de son petit déjeuner en répétant qu’elle n’a pas faim, alors qu’elle a généralement bon appétit à cette période de la journée. Je constate en effet qu’elle a un problème de déglutition ce qui m’interpelle une première fois.

Aujourd'hui le banc est resté vide.

Ce jour là le banc est peut-être resté vide.

Je lui prends la tension avec mon tensiomètre à poignet. Elle est très basse à 8,4.
Je lui dis de rester bien assise pendant que j’appelle le médecin traitant qui me conseille d’attendre l’infirmière pour une nouvelle prise de tension. Je préviens également sa fille.

Finalement elle prend son petit déjeuner. Le téléphone sonne. C’est sa petite-fille de Nouvelle Zélande. Elle se lève pendant que je suis au téléphone et m’appelle s’appuyant sur le haut du radiateur. Elle ne peut plus avancer.
J’interromps la communication, je vais l’aider à s’allonger sur le canapé.

L’infirmière arrive. Elle trouve la même tension et téléphone au médecin traitant qui ne peut se déplacer en suggérant d’appeler les urgences médicales.
L’infirmière les appelle puis repart. Elle me demande de la tenir informé.

Pendant ce temps, j’installe la personne dans son lit. Je la réconforte. Je lui donne surtout à boire vu qu’elle a la diarrhée.
L’urgentiste ne voit pas de signaux d’alerte. La tension de la personne couchée est remontée. Il prescrit une prise de sang, d’urine et prévient directement le laboratoire.

L’infirmier arrive pour la prise de sang et la personne doit se lever pour l’analyse d’urine. Nous l’aidons puis d’un seul coup elle ne peut plus avancer. Nous la recouchons en lui parlant pour qu’elle ne perde pas connaissance. Nous lui posons des questions.
Avec l’infirmier nous sommes d’accord, il faut rappeler le médecin des urgences.

Je téléphone à nouveau à sa fille qui me dit qu’elle va le rappeler. Elle me dit aussi qu’il faut que je mange un peu.
Après avoir préparé une soupe pour la personne aidée j’insiste sur le fait qu’elle ne doit pas se lever. Je décide alors de m’asseoir un peu dans le séjour avec un thé et un encas pour essayer de me détendre.

La personne m’appelle. Je ne l’ai pas entendu se lever. Dans l’appartement il y a pratiquement de la moquette sur tous les sols. J’accours. Elle est assise sur le cabinet des toilettes. Elle n’a plus la force de se relever. Je l’aide mais ses jambes flageolent. Je la couche sur la moquette et je la mets en position de sécurité. J’apporte un oreiller pour surélever sa tête et une couverture pour qu’elle ait bien chaud.

Sa fille me rappelle , me dit que l’urgentiste a dit d’attendre, on ne peut rien faire sans les résultats. Je lui raconte ce qui vient de se passer, que son état a empiré, et que je m’apprête à appeler le SAMU. La personne vient de vomir. Le SAMU me demande s’ils doivent faire venir un urgentiste ou une ambulance. Je ressens l’état d’urgence, je choisis la deuxième option.

Nous aurions préféré sortir et voir les oiseaux...

Nous aurions préféré sortir et voir les oiseaux…

Arrivée à l’hôpital la personne est de suite prise en charge. J’ai apporté un sac avec quelques affaires de toilette, chemise de nuit, robe de chambre, chaussons que j’avais préparé en cas d’hospitalisation. On me dit d’attendre dans la salle d’attente. Une heure passe, le temps est long, je prends des nouvelles. On me signale que la personne va être hospitalisée. J’attends d’avoir connaissance du numéro de chambre. Deux heures se sont écoulées. Je me relève et reformule la question.

Enfin je sais où elle se trouve. Je vais la voir. Je suis interloquée de la voir si rapidement debout. Son visage a changé, sa voix, son regard. Je ne la reconnais plus. Je confie à l’infirmière mon inquiétude et mon soulagement. Elle me confirme qu’elle a une gastro-entérite virulente avec déshydratation. Je suis étonnée du diagnostic la personne ne s’étant pas plainte ni de mal de ventre, ni de fièvre. Elle m’explique qu’une gastro-entérite chez une personne âgée ne se manifeste pas pareil que chez un enfant ou un adulte. Je lui demande si ce n’est pas possible qu’elle voit un neurologue. Elle me répond que malheureusement elle ne pense pas.

Je rassure la personne avant de partir et pour éviter toute déambulation. Je lui mets comme à mon habitude un aide-mémoire « Madame… vous êtes à l’hôpital. Restez couchée ».

Choquée par ce changement, j’oublie mon petit papier où j’ai noté le numéro de chambre pour le transmettre à sa fille par message. Je reviens sur mes pas. La personne dort. Pendant que je m’approche, elle ouvre ses yeux. Je lui souhaite une bonne nuit et je referme la porte derrière moi.
Je préviens l’infirmière qu’il est inutile de passer demain chez la personne, qu’elle est hospitalisée pour une gastro-entérite virulente avec déshydratation.

oiseau parisienNous verrons plus tard que les chutes de tension provenaient de deux médicaments pris simultanément. Aujourd’hui l’infirmière lui en donne un le matin et le soir nous lui donnons l’autre au dîner.

Depuis tout est rentré dans l’ordre… sauf bien sûr la maladie d’Alzheimer. Malheureusement.

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