On ne présente plus Google, le géant de Mountain View, qui s’est imposé sur la recherche, la publicité sur le web, puis plus récemment comme compétiteur d’Apple dans les OS mobiles avec Android. La firme s’est largement diversifiée, rendant parfois sa stratégie brouillonne, avec des produits tels que Youtube (rachat), Google Images (Picasa), GoogleMap, GoogleDocs, Google Apps, Google Voice, Chrome, ChromeOS, ChromeBook, Translation, Google Books … Il y en a tellement qu’il est impossible de tous les citer à la volée. Il y a même une voiture Google !

Google s’est du coup aussi largement raté sur certains sujets, et le plus important d’entre eux concerne les projets Wave et Buzz, des tentatives d’entrée dans le monde des réseaux sociaux largement dominé par Facebook. La critique qui suit concerne ce secteur là, et la perspective de vivre une convergence prochaine de ces produits, vue par un utilisateur qui apprécie certes les produits Google, mais bien plus encore ceux d’Apple (je teste actuellement et depuis plusieurs semaines iOS 5 et iCloud, et suis déjà passé sur OS X Lion comme beaucoup d’entre vous) ; un utilisateur qui passe depuis 2 ans plus de temps sur Twitter que sur Facebook.

Google - Les services

Différents services web de Google

Parmi les grands acteurs du Web 2.0 dits « généralistes » on peut citer Facebook, très largement leader, puis Twitter. Viennent ensuite des acteurs plus spécialisés comme (la liste n’est volontairement pas exhaustive) Foursquare (géolocalisation), FlickR (photo), Youtube / Dailymotion (vidéo), Spotify (musique) … Viennent s’y greffer d’autres acteurs qui soient proposent des services complémentaires et/ou des outils utilisant les API proposées. Une API, pour simplifier, étant une « interface de programmation » qui avec ses fonctions permet d’interagir avec le service de base. Une ouverture vers l’extérieur en quelque sorte sur laquelle on vient se greffer. Il y en a un grand nombre comme Seesmic, Tweetdeck (racheté depuis par Twitter), Hootsuite, Instagram, … Mais face à l’hégémonie de Facebook (on serait à plus de 600 millions d’inscrits dans le monde !) ni Apple (avec Ping), ni Google (avec Buzz), n’ont réussi à proposer une alternative (Microsoft est actionnaire de Facebook). Pourtant l’enjeu est de taille, et tout géant qu’ils sont, dans ce secteur là, tout va très vite, et une hégémonie peut rapidement être contestée (exemple la recherche sociale peut remplacer la recherche web classique).

La page d'inscription de Facebook

La page d'inscription de Facebook

Alors qu’Apple intègre maintenant Twitter nativement dans iOS 5 (ce qui semble être soit un galop d’essai avant d’autres intégrations ou un vrai rapprochement avec le réseau social qu’il a les moyens de racheter), et s’apprête à lancer en grandes pompes iCloud, Google a présenté et proposé aux beta testeurs son réseau social Google+. Je m’y suis inscrit autour du 30 Juin 2011 et depuis plus de 25 millions d’utilisateurs (source ComScore) auraient fait de même. Ce chiffre a ceci d’impressionnant : 1 millions d’inscrits supplémentaires chaque jour, Facebook a mis 3 ans pour atteindre ce chiffre, Twitter un peu plus de 30 mois. Attention, à la lecture de ces chiffres, j’y vois plusieurs éléments. Tout d’abord Twitter et Facebook ont largement contribué à l’adoption rapide du nouveau venu. C’est une preuve de plus que tout s’accélère encore. Ensuite il y a une forte attente de la part des utilisateurs des services Google (176 millions pour Gmail) et des Early Adopters. Mais cela n’a pas empêché Ping de Apple (lié à iTunes, plus de 150 millions de comptes avec moyen de paiement associé), ni Google Buzz, de ne pas être suivis. Alors qu’est ce qui pourrait faire que cette fois ce sera différent ?

Google - Buzz Logo

Avant tout, un exaspération de Facebook par une partie de ses utilisateurs. Les problèmes à répétition de confidentialité des données, et les passages en force successifs de la compagnie de Mark Zuckerberg, font que l’attente est grande d’avoir une alternative. Google sera-t-il plus respectueux de ce point de vue ? Il faut l’espérer.

Google - Buzz et Gmail

Google Buzz, toujours intégré à Gmail.

Puis, il y a un changement de stratégie. Si Buzz a tenté une percée via le service Gmail dans lequel il s’intégrait, Google+ a pris les webmaster de sites et blogs par les sentiments. Actuellement le moteur de recherche jouis d’une toute puissance sur le classement des résultats, et donc sur le trafic des pages référencées. Rappelez vous de ces sites d’informations belges qui ont été brièvement déclassés de Google ou de l’impact de Google Panda (changements récents dans l’algorithme du moteur). Afin d’utiliser cette position de force, Google a d’abord créé le bouton « +1 ».

Google - Bouton +1

Le bouton +1

Celui ci peut être comparé au « J’aime » de Facebook, mais promet de modifier les résultats du moteur, dans leur classement et dans leur affichage en mode connecté, afin de mettre en avant les plus populaires, et ceux de vos contacts. De quoi faciliter une adoption massive, n’est ce pas ?

Google - Bouton +1 Google Results

Résultats Google en mode connecté, impact du +1

Quelques semaines plus tard, après s’être assuré de l’adoption du dernier né, Google a dévoilé Google+, son nouveau réseau social. Celui ci reprend des éléments déjà existant, comme votre profil si vous en avez un, Google Buzz (on s’interrogera sur son utilité sur le long terme, vis à vis de l’onglet « Posts »), et bien sûr +1.

Google - Onglets profil

Les différents "onglets" d'un profil Google+

On retrouve aussi tout en haut des pages du réseau social (et depuis de la plupart des services Google) des raccourcis forts pratiques. Juste en dessous, les principales rubriques : Home, Photo, Profil, Circles, et depuis peu Games. Cela a l’avantage d’être clair, et c’est d’ailleurs la première chose qui saute aux yeux face à un Facebook devenu brouillon.

Google + - Raccourcis

Raccourcis rapides vers les principaux produits Google, puis en dessous des principales rubriques de Google+

L’une des nouveautés introduites par Google+ est une nouvelle façon d’envisager les listes/groupes. Ici lorsque l’on ajoute un contact (issu de Gmail ou nouveau) on l’associe à un ou plusieurs cercles. Ensuite lorsque l’on partage un statut, des photos, des vidéos … on décide à quels cercles on le fait. La même chose lors de la consultation, on peut filtrer par cercles. C’est l’une des grandes différences avec Twitter et Facebook. Je peux donc décider que tel groupe verra ce que je dis sur Disney, et un autre sur les nouvelles technologies, et un autre sur la famille etc … Quand je dis groupe cela peut aussi être des personnes désignées séparément. Je peux aussi décider de diffuser à l’ensemble de mes cercles, aux cercles de mes cercles, et à tous sans restriction. Ce système offre une grande souplesse dans le partage et la lecture, et évite l’exaspération que l’on peut avoir à lire un contenu qui ne nous intéresse pas, alors que d’autres partagés par la même personne nous passionnent. Il y a une réflexion à avoir sur la stratégie à adopter, plus complexe que sur Twitter. J’y vois aussi moins de rigidité que le système d’amis de Facebook, alors qu’à l’instar de Twitter, Google+ permet de suivre quelqu’un qui ne nous suit pas, de façon asynchrone. Cela me plaît. Le revers de la médaille est que l’on perd pour l’utilisateur lambda toute la simplicité d’un Twitter.

Google - Cercles

Partagez avec qui vous voulez grâce aux cercles

Pour le reste Google+ propose des choses plus classiques comme l’ajout d’une photo, d’une vidéo, d’un lien, et la géolocalisation. Vous pouvez ensuite +1 ou partager une publication. La barre latérale propose de consulter les différents flux (« Stream ») de ses cercles, de voir d’autres flux appelés « Sparks » qui filtrent par mots clés, et enfin d’accéder au chat avec une ou plusieurs personnes. La visio-conférence à plusieurs est possible grâce à la fonction « Hang out » proposée sur la barre de droite sous les suggestions et les invitations disponibles.

L’intégration des différents produits Google est pour le moment peu poussée, mis à part Picasa, duquel « Photo » récupère les albums. Quant à Youtube celle-ci est très discrète. Il faudra certainement attendre un peu avant de voir de réelles interactions avec par exemple Calendar pour la gestion d’évènements, ou Google Docs pour le partage de documents avec ses contacts. Les jeux viennent s’arriver, avec leur tête l’emblématique Angry Birds, déjà présent sur le Chrome Web StoreCar c’est là l’un des principaux atouts de Google, il ne reste qu’à consolider son écosystème et à l’harmoniser, ce qui représente aujourd’hui l’un de ses plus grands enjeux. Il sera ainsi évident à un utilisateur de Chrome / Chrome OS ou d’Android, qu’il restera avec Google tout au long de son expérience en ligne. Pour le moment aucun éditeur n’a réussi ce tour de force, et Apple suit également ce chemin (avec iCloud).

Du point de vue des webmaster et des annonceurs il manque également l’équivalent des Pages Fans, c’est à dire une page consacrée non pas à une personne mais à un site web, un blog, une marque et/ou une entreprise. Le système de cercles devrait y être conservé. Enfin, et c’est à mon avis l’une des plus grosses attentes aujourd’hui, c’est la mise à disposition d’une API permettant à des applications de se greffer sur Google+. Je pense à Hootsuite, Seesmic et Tweetdeck, je pense à Instagram également et à bien d’autres. Si on utilise plusieurs réseaux sociaux, on ne peut pas matériellement prendre le temps de multi poster avec des applications différentes. Impossible.

L’infographie ci-dessous offre un comparatif intéressant :

comparaison-reseaux-sociaux-infographie

Cliquez pour agrandir l'infographie. Source : mashable.com/2011/08/10/social-network-comparison/

Je souhaitais enfin aborder une très bonne surprise, c’est l’ergonomie du site. Très honnêtement c’est pour moi l’un des points faibles de Google qui multiplie souvent les fonctionnalités, de la même manière qu’un Microsoft, et parfois de façon très brute. Ici cela reste épuré, mais chaque fonction est d’une simplicité déconcertante. Grâce aux possibilités qu’apportent les nouveaux navigateurs comme Chrome, Safari ou Firefox, on oublie les clics à répétitions, les validations, les changements de pages et autres joyeusetés qui nous faisaient perdre du temps. Google+ devient donc l’une des références en la matière et comme dis plus haut une harmonisation sur l’ensemble de l’eco-système est à espérer de ce point de vue aussi.

Quatre exemples :

  • Les notifications apparaissent en haut à droite, et se déroulent sans changer de page.
Google + - Notifications

Les notifications. Un clic pour voir le détail sans jamais quitter la fenêtre.

  • L’ajout dans un cercle se fait souvent en passant la souris devant le bouton, ce qui ouvre le détail, et permet d’effectuer un seul clic. Sur la page dédiée il se fait par glisser/déposer.
  • L’ajout de photos par simple glisser déposer. Fini le bouton « Parcourir », et l’ajout de photo une par une…
  • Lorsque vous écrivez un commentaire, si quelqu’un poste avant vous, vous le verrez automatiquement.

Du point de vue Mobile maintenant, je suppose qu’Android intégrera à terme nativement Google+. Sur iPhone/iPad il existe une application plutôt simple et fonctionnelle. Une fonction intéressante permet de voir le flux « Nearby », c’est à dire les posts « publics » postés à proximité de votre lieu présent, si toutefois vous êtes bien localisé. Super pour les évènements. J’ai rencontré des personnes via Twitter de cette façon, et c’est l’une des forces des réseaux sociaux, facilitateurs de rencontres.

Enfin il reste un problème. En effet quand on a mis beaucoup de sueur à créer ses listes de contacts, à créer et construire ses relations sur plusieurs réseaux sociaux, il est difficile d’envisager de le faire pour un nouveau. Il n’y a pas de solution magique, un réseau social comme toute relation humaine, c’est du temps, c’est de l’investissement. Ce sera certainement l’un des principaux freins à l’adoption massive de Google+ plusieurs années après Facebook et Twitter. Il y a cependant pour débuter une astuce. D’abord si vous avez un compte Gmail, le site vous fera ses suggestions en fonction. Et vous pouvez aujourd’hui sur Yahoo Mail importer vos amis Facebook. Yahoo permet ensuite d’exporter au format CSV. Enfin Gmail vous propose d’importer votre fichier. Il restera à tout reclasser dans vos cercles, et à espérer que vos amis soient déjà connectés à Google+ ou qu’ils acceptent votre invitation. C’est compliqué et il est à supposer que Facebook ne compte pas vous faciliter la tâche, tel un opérateur téléphonique qui vous retenait en empêchant la portabilité du numéro.

Pour terminer, je n’ai pas trouvé d’astuce pour Twitter. En réalité à l’heure actuelle Google+ refuse les pseudos, alors que Twitter fonctionne sur ce principe. Cependant vous pouvez indiquer vos pseudos dans votre profil pour faciliter les recherches. Le soucis que j’ai eu c’est que certains contacts Twitter m’ont fait le plaisir de m’ajouter dans leurs cercles, mais ne sachant pas à quel pseudo cela fait référence, j’ai été obligé de créer un cercle « ? » pour espérer pouvoir les reclasser ultérieurement.

En bonus, si vous avez Chrome, voici une extension qui vous sera utile : Publish sync for google+ & facebook Elle permet de multi poster entre réseaux.

Voilà pour ce tour d’horizon de ce nouveau réseau social. Il débute donc sous de bons auspices, reste à Google de transformer l’essai et à nous étonner encore. N’hésitez pas à m’ajouter (j’ai mis un widget sur la colonne de droite), et à me donner votre avis, vos impressions, vos questions. Cet espace est aussi le vôtre. Si vous n’avez pas d’invitations dites le moi avec votre email Gmail ! A bientôt !