Article de Chantal PANAS
« Je n’aime pas les grandes scènes. J’aime être frappée par une vérité-sincère. J’aime faire les femmes excentriques, un peu folles, bien que ce ne soit pas dans mon caractère »
Ingrid BERGMAN, interviewe réalisée par France HOCHE (ina.fr, 1960)
La 68ème édition du Festival, rend hommage à la célèbre actrice pour l’année du centenaire de sa naissance.
À cette occasion, les Éditions J’ai Lu, sortent en livre de poche « L’année des Volcans » de François-Guillaume LORRAIN.
La Beauté Américaine et le Talent d’Hollywood : Ingrid BERGMAN (1915-1982) (67 ans) ; Ingrid est orpheline à l’âge de douze ans, sa mère meurt à ses trois ans, son père l’élève jusqu’à ses douze ans.
Le mystère glacé, envoûtant, l’aisance, l’élégance, doux, lent.
Le Génie Italien et l’Inspiration : Roberto ROSSELLINI , réalisateur(1906-1977) (71 ans) ;
-« Nos Chefs d’œuvre Italiens sont produits avec notre Cœur, notre Âme, notre Sang, notre Histoire, Notre Douleur, nos Larmes, nos Rires, notre Misère »
Roberto est issu d’une famille bourgeoise, son père est architecte. Déjà enfant, il aime à se cacher et ressurgissait soudainement, pour scruter les visages effrayés. Il aime prendre des risques. Il dit que dès qu’un Romain n’a pas le sentiment de la nouveauté, il s’ennuie. Il arrive bien à pressentir le désir d’autrui.
Roberto ROSSELLINI tourne rapidement, sans scénario bien défini mais plutôt par des idées, avec des acteurs professionnels ou non. Son mouvement est basé sur le néoréalisme. « J’ai ressenti instinctivement le cinéma comme un moyen d’affronter la vie réelle, donc pour s’approcher des choses vraies dans un certain domaine ». Il ne croyait qu’à la liberté, à l’illumination, au sacrifice, au sublime.
Il réalise une trilogie de guerre, les deux premiers scénarios ont été écrit par Serge AMIDEI : « ROME, VILLE OUVERTE » en 1945, ; « PAÏSA » en 1946 et « ALLEMAGNE ANNÉE ZÉRO » en 1948.
Roberto a une grande souffrance dont il ne se remettra jamais. Son fils Romano, qu’il a eu avec Marcella de MARCHIS est décédé, à l’âge de neuf ans. Il s’est culpabilisé d’avoir insisté, pour qu’il aille chez sa grand-mère en Espagne, où s’est déclarée la fièvre.
« Anna MAGNANI (1908-1973) (65 ans), son visage est celui de la réalité invincible, et sa beauté si profonde , qu’il paraît mêler la souffrance à l’extase » de Tennesse WILLIAMS
Le visage dépouillé, tragique, la violence, la passion, l’impétuosité de son jeu. Anna ne connaît pas son père, sa mère s’installe en ÉGYPTE où elle épouse un Autrichien fortuné. Anna est élevé par sa grand-mère, ses cinq tantes et son oncle Romano. A la fin de la première guerre mondiale, sa mère rentre et l’inscrit dans un couvent français de la capitale, pour qu’elle poursuive des études.
Anna a un fils avec l’acteur Massimo SERATO, de 8 ans son cadet, qui prend la fuite. Elle l’élève, seule, il est atteint de la poliomyélite à l’âge de deux ans. Il passe une majeure partie de son enfance dans un fauteuil roulant. Elle fait son possible pour lui. Lucas donne naissance en 1975, à une future actrice Olivia MAGNANI.
À propos du livre : « L’ANNÉE DES VOLCANS » de François-Guillaume LORRAIN, éditions J’ai lu
(7,50 euros)
A BROADWAY LE 12 DÉCEMBRE 1946 :
L’enseigne lumineuse du WORLD THEATER clignotait faiblement dans la nuit « Open City, by Roberto ROSSELINI, ROME » (ROME VILLE OUVERTE), des lettres éclectiques semblaient rendre l’âme.
Une jeune actrice de trente et un ans, Ingrid BERGMAN, suédoise, aux jambes interminables, au visage de madone, aux cheveux blonds et aux yeux bleus, franchit le seuil avec son mari, Peter LINDSTRÖM, un neurochirurgien. Ils ont un enfant ensemble , PIA.
Au moment, où Ingrid BERGMAN découvre l’actrice Anna MAGNANI, qui vient de lui faire croire qu’on peut mourir au cinéma, émue, elle prononce ces paroles
« ….Alors que la rage de cette femme et la façon dont elle meurt, c’était, c’était … »
À l’époque, Ingrid BERGMAN joue « Jeanne D’Arc » à l’Alvin Theater, à NEW YORK.
C’est SELZNICK qui l’a imposée à HOLLYWOOD, il voulait une anti-Garbo, la pureté de bonté faite femme, la fraîcheur sans mystère.
Robert CAPA, photographe et reporter de guerre, son amant, lui avait expliqué qu’elle n’était pas une actrice, mais une marionnette, un produit, une marque, une industrie, sa liberté se résumait à jouer où son producteur lui disait de jouer.
Ingrid BERGMAN a des doutes sur sa carrière et son couple ne fonctionne plus.
Elle attend un signe et hésite entre les réalisateurs HUSTON ? WYLER ? WILDER ? ROSSELLINI ?
Ingrid BERGMAN va provoquer le destin, en écrivant une lettre à Roberto ROSSELLINI :
« Si vous avez besoin d’une actrice suédoise qui parle très bien l’Anglais, qui n’a pas oublié son allemand, qui n’est pas très compréhensible en français et qui, en italien, ne sait dire que TI AMO, je suis prête à faire un film avec vous ».
Sans rien connaître d’elle, en bon gentleman, Roberto lui envoie un télégramme :
« Je viens de recevoir avec une grande émotion votre lettre qui arrive pour l’anniversaire de ma naissance comme le cadeau le plus précieux stop il est absolument vrai que je rêvais de faire un film avec vous à partir de ce moment je ferai tout pour que ce rêve devienne réalité dès que possible stop je vous écrirai pour vous soumettre mes idées stop avec mon admiration veuillez accepter l’expression de ma gratitude avec mes meilleurs sentiments ».
Roberto va dépêcher Serge AMIDEI et Fédérico FELLINI, de lui trouver un récit de vie, parmi tant d’autres.
Mais il a également promis un film, à sa maîtresse et talentueuse actrice italienne, Anna MAGNANI.
MAGNANI est une femme impétueuse, souvent de très mauvaises humeurs. Elle est très impulsive et a des crises incontrôlables contre Roberto, qui dit être stimulé.
Anna va t-elle laisser faire, sans réagir, elle qui est italienne, envers une suédoise, qui vient des industries cinématographiques hollywoodiennes ?
Elle qui pense entrevoir, le devenir de leur relation: « Ils aspiraient tous ceux qui l’approchaient dans un tourbillon d’énergie. Mais c’était pour mieux s’absenter, tel un mirage, toujours visible, toujours fuyant. Il finira aussi par la fuir ».
Ce que j’en pense :
Je me suis attachée à ces trois monstres sacrés du cinéma dont leur parcours est celle d’une Vie, avec ses joies et ses tourments.
J’ai même eu ma petite larme à l’œil.
Silence On Tourne ! Nous sommes dans le néoréalisme.
INGRID BERGMAN ET ROBERTO ROSSELLINI auront ensemble trois enfants :
- des jumelles : Isabella qui va être Présidente du Jury de la section « UN CERTAIN REGARD » au Festival de Cannes, Isotta-Ingrid ;
- Renato Roberto Giusto Guiseppe.
Bon Livre et Bon Festival de CANNES 2015 !