Au début il y avait l’annuaire Yahoo, Lycos, Excite, Altavista, Nomade et Voilà. Puis en 1998 (je m’en souviens, c’est l’année où j’ai commencé à travailler pour Club-Internet) est arrivé Google, de Sergei Brin et Larry Page.

De Yahoo, Lycos, Excite, Altavista, Nomade et Voilà, à Google. L’écrasante domination de Google sur le secteur de la recherche… mais pas que.

En 2000, Yahoo prend une décision qui a peut-être contribué à lui mettre un pied dans la tombe, d’intégrer Google comme moteur de recherche (il se ravisera plus tard, optant pour Bing). En 2002, AOL fait le même choix. La messe est dite Google va rapidement prendre une part de marché aussi insolante que Microsoft dans les meilleures années de Windows, et la plupart de ces moteurs vont tout simplement disparaître.

home-google-2017

La page d’accueil de Google, minimaliste, n’a que peu bougée en 20 ans. Cette simplicité et ses Doodles google.com/doodles/ ont fait son succès.

Quelques chiffres pour résumer Google en 2016 : 92,9 % de parts de marché dans le monde (94,1% en France !), alors que Bing de Microsoft est seulement à 2,2%. Transitent par Google, 20 milliards de sites visités chaque jour par Googlebot, pour améliorer les résultats de 3,3 milliards de requêtes sur la même période. Impressionnant non ?

Parallèlement Google a fidélisé (et même enchaîné d’une certaine manière) les internautes en étendant très largement le spectre de ses services. Citons en quelques-uns parmi ses succès (pour beaucoup d’échecs dont on se souvient moins, mis à part Google +) : Google Chrome, Android, Youtube, Google Maps, Google Traduction, Gmail, Google Analytics, et Google Drive / Google docs…

De quoi imposer son modèle publicitaire avec Google Adwords, et devenir l’ami/ennemi préféré des éditeurs, sur lesquels il a presque droit de vie et de mort puisqu’il génère la plupart de leurs visites (et vous sans doute qui lisez ces lignes). Là on peut regretter une absence de concurrence crédible, et un meilleur équilibrage avec d’autres acteurs de la recherche.

En outre ces revenus permettent à Google de financer ses nombreux projets objets connectés, voitures autonomes, robotique, Big Data et intelligence artificielle notamment. On pourra bientôt augmenter l’être humain, et le réhabiliter (par une greffe robotique par exemple), et Google souhaite avoir une place de leader dans cette vision transhumaniste. Voilà à quoi servent, in fine, les revenus générés par notre dépendance à Google. Pour le meilleur et peut-être le pire, l’avenir nous le dira.

Quelle concurrence pour Google sur la recherche ? Les moteurs de recherche alternatifs (Qwant, DuckDuckGo, Bing, et les autres)

Si Google a ce succès, c’est avant tout parce qu’il a su habilement proposer un service innovant et de qualité. Mais aussi nous retenir par une multitude de services annexes, jusqu’au moment où notre seul réflexe est d’y faire toutes nos recherches et de faire logiquement de même pour référencer nos sites / blogs. Nous devons à tout prix plaire au géant de Mountain View sous peine d’être déclassés quitte à avoir un WWW uniforme. Google suit d’ailleurs de plus en plus une autre logique, proposer directement les réponses à nos questions sur sa page, nous évitant d’aller même jusqu’au site Internet (souvent Wikipédia pour le moment). Un peu comme Facebook qui incite les éditeurs de presse à publier leurs articles directement sur le réseau social.

DuckDuckGo-Reves-Connectes

La recherche « Rêves Connectés » sur DuckDuckGo

Il y a des alternatives, mais connaissez-vous seulement leurs noms ? Je me suis particulièrement intéressé à Qwant (le frenchie de l’étape) mais on peut aussi citer DuckDuckGo, Framabee, Wolfram Alpha, Startpage et Yacy. La plupart nous promettent de protéger nos données privées voire de ne pas nous pister, et de ne pas nous enfermer (sur Google lorsque vous êtes identifié, vous voyez des résultats qui peuvent être différents d’un utilisateur à l’autre, ou d’un mode déconnecté). Sauf le Bing de Microsoft, qui a un modèle comparable à Google, mais bizarrement, malgré son intégration dans Windows 10, ne semble pas décoller, peut-être justement parce qu’il ne s’en démarque pas assez, et aussi parce que Microsoft a failli en abandonnant ses Windows Phone et donc, d’une certaine manière, la recherche mobile.

Qwant est-il une alternative crédible à Google ? J’ai testé durant un mois avec Firefox

Forcément la démarche de Qwant intéresse. Tout d’abord un acteur européen, qui plus est français, dans un décor ultra dominé par les États-Unis, ne peut que nous enthousiasmer. L’entreprise qui vient de lever 18,5 millions d’euros (via Axel Springer le groupe de presse allemand et La Caisse des dépôts) a pour ambition de séduire 10% des internautes. Ils auraient traité 2,6 milliards de requêtes en 2016 ce qui est très bien, tout en étant en deçà de Google en … une journée. Il va donc falloir communiquer et convaincre. Côté business model, il s’agit purement et simplement d’affiliation (commission sur les ventes générées).

home-qwant-2017

La page d’accueil de Qwant

Il est très difficile, sauf avec des recherches très longues de jauger de la qualité de résultats, et de dire si ceux de Qwant (ou un autre) seraient plus pertinents que Google. Il y a certes la quantité de pages référencés mais aussi l’algorithme derrière qui classe une page plus ou moins bien, selon des critères que les experts SEO se disputent et dont la pertinence se discute forcément. On me dit que Google privilégie les sites faisant autorité, rapides, mobiles, sécurisés, connecté aux réseaux sociaux et répondant à certaines règles de rédaction. Je ne vous cache pas que cela me laisse souvent assez perplexe, mais je m’y plie comme les autres, espérant que le site soit plus visibles dans les résultats car si on écrit, c’est pour être lu.

Pour Qwant, mystère. La transparence voudrait que celui-ci soit communiqué, encore une fois pour se démarquer. Ce que l’on sait c’est qu’ils possèdent leur propre index (certains se servent chez … Google). Du coup on se focalise sur l’interface et sur notre ressenti. Je me suis retrouvé à tester un peu par hasard, en installant l’extension Qwant sur Firefox. Je l’ai utilisé très souvent, avant de progressivement l’abandonner. Cela s’est fait d’abord sans trop y penser parce que je suis repassé sur Safari qui intègre lui par défaut Google, Yahoo, Bing et DuckDuckGo. J’ai tout de même réinstallé l’extension dédiée.

Qwant. Des résultats pour le web, l’actualité, les images, la vidéo, le shopping mais aussi les réseaux sociaux et la musique !

Le moteur de recherche propose ses résultats sur plusieurs colonnes, ce qui permet d’un côté d’avoir les différents résultats sur la même page, d’un autre c’est difficilement lisible surtout qu’en l’absence de réponses, la colonne s’affiche quand même (exemple : s’il n’y a rien dans réseaux sociaux).

Parlons-en justement des réseaux sociaux, car c’est l’un des points les plus intéressants de cette recherche (web, actualités, images, vidéos, shopping c’est plus classique) d’autant que les résultats sociaux ne semble pas toujours très pertinents (Que du Twitter à ce que j’ai pu voir, avec des résultats différents de la recherche du réseau social), ou bien présenté (les RT classiques s’affichent comme un tweet manuel à l’ancienne). Il faudrait mieux les afficher, avec les images, et proposer d’autres réseaux sociaux.

Resultats-sociaux-Qwant

Les résultats sociaux : une bonne idée mais peut pertinente pour le moment.

On retrouve en tête, juste avant les résultats, des onglets avec « à propos » (en général du Wikipédia), les premières images, vidéos et le shopping. Étrangement alors que c’est le « gagne pain » de Qwant, c’est encore en développement, pas beaucoup de résultat. Pourtant, je sais en utilisant Google que le résultat est biaisé car lié à Google Adwords, ici on pourrait s’attendre à avoir un résultat plus transparent (mais ce ne sera pas le cas puisqu’il faudra mettre les liens d’affiliation en avant). Je rêve d’un comparateur de prix garantie sans biais. Pour les autres onglets « à la une » c’est bien, même si il y a trop peu de résultats pour que ce soit pertinent, et on préférera passer directement par les rubriques sur le côté. Je n’ai pas trouvé dans les préférences comment masquer cette zone, cela n’est sûrement pas possible. Dommage.

Resultats-en-tete-Qwant

Le Shopping dans l’en-tête de Qwant

J’aime le concept du filtre par rubrique sur le côté. Il y a même « musique » qui pour l’instant semble renvoyer des résultats d’iTunes uniquement (sans doute pour l’affiliation lors des ventes). Agréger les autres services comme Deezer, Spotify, Qoboz et d’autres serait un vrai plus. On peut aussi écouter les extraits directement sur Qwant et voir les résultats de recherche pour un artiste donné.

musique-qwant

La musique (ici Jean-Michel Jarre) sur Qwant

Qwant propose aussi des « Carnets ». On dirait un système de curation, entre des bookmarks / signets et un Scoop-it. A priori une bonne idée également, mais j’avoue je n’ai rien compris (alors imaginez l’internaute lambda…).

Enfin, cela va plaire aux parents, il existe une version Qwant Junior.

On aime aussi Google pour d’autres fonctionnalités qui ne sont pas sur Qwant. Par exemple si je tape « convertisseur euro dollar » sur Qwant il commence par me donner des convertisseurs PDF … alors que Google a tout de suite compris et peut d’ailleurs me donner le résultat de ma conversion directement.

reglages-qwant

Les réglages minimaliste de Qwant. On aime pouvoir les retrouver via une URL.

Qwant. Du potentiel en attendant un acteur européen capable d’entrainer tout le secteur ou un vrai service public ?

Le domaine de la recherche est tellement crucial sur internet, qu’on ne peut qu’encourager un contre-pouvoir européen face à l’hégémonie américaine. On espère donc le meilleur pour Qwant. On peut aussi se demander si un tel service ne devrait pas être du domaine du service public indépendant pour garantir son fonctionnement et son indépendance (de la publicité notamment).

Ce qu’il faut à Qwant, c’est du temps pour trouver son modèle et perfectionner sa recherche. Du temps et des moyens pour communiquer et convaincre. Mais il faudrait aussi que les acteurs se fédèrent au niveau européen pour former un éco-système comparable à celui de Google. Les start-up européennes ont besoin d’une force d’entrainement, d’une dynamique, et lorsque l’on voit les entreprises/marques les plus puissantes au monde on retrouve Google, Apple, Amazon, AT&T, Microsoft, Samsung, Verizon … Le premier européen dans le domaine des technologies est Deutsch Telecom / T à la 19ème place, le premier français (Orange) est … 51ème … !

Enfin il faut aussi que les français acceptent de sortir de leur zone de confort en essayant d’autres moteurs, mais pour ça, il faut encore qu’ils en soient informés.

Et vous que pensez-vous de Qwant et des alternatives à Google ?